Partie 2 : La révolution humaine. Chapitre 11
Qu’est-ce que la révolution humaine ? [11.6]

11.6 Un effort incessant pour transformer la réalité

En se fondant sur le principe bouddhique de la réalité ultime de tous les phénomènes, le président Ikeda explique qu’un changement dans notre vie entraîne immanquablement un changement dans notre environnement. Il ajoute qu’il ne « saurait y avoir de bonheur que pour soi-même, ni de malheur que pour les autres »

Je suis le disciple du président Toda ; c’est ma plus grande source de fierté. En prison, M. Toda a lu le Sûtra du Lotus avec sa vie. À travers les âges, de nombreux autres érudits pratiquants du bouddhisme ont prétendu avoir compris le Sûtra du Lotus. Certains d’entre eux ont même fondé leur propre école bouddhiste.

Mais M. Toda était différent. Quand un journaliste lui a demandé un jour : « Êtes-vous un bouddha ? » Il a répondu : « Je suis une personne ordinaire et fière de l’être ! »

Englobant avec chaleur les personnes ordinaires qui luttaient pour s’extirper du désespoir et écrire leur propre histoire de renaissance et de renouveau, il s’est dressé fermement, au cœur des tempêtes de la vie. Sa vie a été l’incarnation même de la révolution humaine.

Avec cette seule expression « révolution humaine », il s’est libéré du piège du dogmatisme et de l’hypocrisie, dans lequel la religion tombe si aisément, et a fait fusionner magnifiquement la sagesse suprême du bouddhisme, le mode de vie idéal pour les êtres humains et la voie de l’établissement d’une société meilleure.

La révolution humaine est aussi une révolution sociale et une révolution de l’environnement.

Dans La réalité ultime de tous les phénomènes, Nichiren cite l’ouvrage du grand maître Miaole Annotations sur le Commentaire textuel du Sûtra du Lotus, dans lequel on lit : « Les êtres vivants et leur environnement manifestent toujours Myoho-renge-kyo1. » (Écrits, 387) Le grand maître Tiantai dit également : « Le domaine de l’environnement détient aussi les dix facteurs2. » (Écrits, 359)

Il n’y a pas de séparation entre les êtres vivants et leur environnement. Ils sont un et indivisibles. Là se trouve la source du principe selon lequel la transformation d’un individu conduit à celle du pays et de la société.

Du point de vue bouddhique de la réalité ultime de tous les phénomènes, l’ensemble des divers phénomènes de l’univers constitue, dans leur multitude, une seule entité vivante. Il est impossible qu’un être humain soit heureux isolément, tout comme il est impossible que la paix règne dans le seul domaine de l’environnement. Il ne saurait y avoir de bonheur que pour soi-même, ni de malheur que pour les autres. Plus nous rendons les autres heureux, plus nous sommes heureux, et, tant qu’il existera une seule personne malheureuse, notre propre bonheur ne sera pas complet. Tel est le sens de la réalité ultime de tous les phénomènes. Cet enseignement nous dit donc essentiellement de faire des efforts sans relâche pour transformer la réalité.

Décrivant ses raisons d’écrire son traité Sur l’établissement de l’enseignement correct pour la paix dans le pays, Nichiren écrit : « Je ne dis tout cela que pour le bien du pays, pour le bien de la Loi, pour le bien des autres, non pour mon propre bien. » (Écrits, 166) Les tempêtes de persécutions les plus violentes n’ont pu venir à bout de l’engagement passionné de Nichiren à soulager les personnes de leurs souffrances.

Le président fondateur de la Soka Gakkai, Tsunesaburo Makiguchi, a hérité de cet esprit et a brandi fièrement la bannière de l’idéal de Nichiren – établir l’enseignement correct pour la paix dans le pays –, et il est mort en prison pour ses convictions. M. Toda s’est alors dressé, avec la même motivation, au milieu des ruines du Japon d’après-guerre.

Il est dit dans le Recueil des enseignements oraux : « Le cœur même du Sûtra du Lotus est l’enseignement selon lequel les désirs terrestres sont l’illumination, et les souffrances de la naissance et de la mort sont le nirvana. » (OTT, 173-174) ; et « C’est cette doctrine des trois mille mondes en un instant de vie3 qui permet de se libérer de la souffrance et de faire apparaître la joie. » (OTT, 173)

Le but du bouddhisme, et celui de la Soka Gakkai, est de libérer tous les êtres vivants de la souffrance. La Soka Gakkai ne ménage pas ses efforts pour permettre à chaque personne de goûter le bonheur. C’est son unique raison d’être.

Qu’ils sont nobles et admirables, ceux qui avancent avec la Soka Gakkai !

Du point de vue de la réalité ultime de tous les phénomènes, la scène éternelle originelle, la véritable scène fondamentale de notre vie se trouve ici et maintenant. Nichiren est absolument clair sur ce point quand il affirme : « Cela ne signifie pas qu’il [Le Bouddha] quitte le lieu où il se trouve pour aller dans un autre. » (OTT, 192)

Même si l’endroit ou la sphère d’activité où nous évoluons est tellement pénible qu’il nous apparaît comme une sorte de rétribution karmique, c’est en réalité l’endroit parfait pour accomplir notre mission originelle. En ce sens, ceux qui s’éveillent à la sagesse de la réalité ultime de tous les phénomènes mèneront une vie où tout karma négatif se transformera en brillante mission.

Dès lors que nous en sommes convaincus, nous sommes emplis d’espoir. Chaque personne, chaque situation que nous rencontrons devient alors un précieux trésor.

Le grand poète indien Rabindranath Tagore a proclamé : « Doux est le monde, douce est sa poussière4. » Et, pour décrire les sentiments d’une mère pour son fils, il a écrit :

« Quand je t’apporte des jouets colorés, mon enfant, je comprends pourquoi ce chatoiement de l’eau, de la nue, et pourquoi toutes les fleurs sont peintes – quand je te donne des jouets colorés, mon enfant.

« Quand, pour que tu danses, je chante, je sais vraiment pourquoi cette musique dans les ramures, pourquoi le chœur des vagues pénètre jusqu’au sein de la terre attentive – quand je chante pour que tu danses5. »

L’amour d’une mère pour son enfant est un monde bigarré, un monde où résonne la vibrante musique de la vie. L’amour transcende le fossé qui sépare les individus et ouvre les cœurs à la vérité que toutes les formes de vie ne font qu’une.

C’est la raison pour laquelle, quand nous nous efforçons d’inclure toute l’humanité dans l’amour et la compassion, les teintes et musiques glorieuses de la vie remplissent tout notre être.

Lorsque nous sommes pleinement conscients de la réalité ultime de tous les phénomènes, l’endroit où nous sommes devient la Terre de la lumière éternellement paisible6.

M. Toda a dit que le simple fait d’être en vie devient en soi une jubilation absolue. Le Sûtra du Lotus nous enseigne comment vivre en relevant le défi de créer et d’étendre ce domaine de joie profonde dans le monde réel.

D’après Hokekyo no chie (La Sagesse du Sûtra du Lotus), vol. 1, publié en japonais en mars 1996

La sagesse pour créer le bonheur et la paix est une compilation des écrits de Daisaku Ikeda sur une base thématique.

  • *1Myoho-renge-kyo s’écrit avec cinq caractères chinois, tandis que Nam-myoho-renge-kyo en compte sept (nam ou namu étant composé de deux caractères). Dans ses écrits, Nichiren utilise souvent Myoho-renge-kyo comme synonyme de Nam-myoho-renge-kyo.
  • *2Les dix facteurs sont dix aspects partagés par tous les êtres vivants des dix états (ou dix mondes) : l’apparence, la nature, l’entité, le pouvoir, l’influence, la cause interne, la cause externe, l’effet latent, l’effet manifeste, et leur cohérence du début jusqu’à la fin.
  • *3Trois mille mondes en un instant de vie : système philosophique établi par le grand maître Tiantai en Chine, sur la base du Sûtra du Lotus. Les « trois mille mondes » correspondent aux divers aspects que la vie revêt à chaque instant. À chaque instant, la vie manifeste l’un des dix états (ou dix mondes). Chacun de ces mondes possède en soi le potentiel des dix, créant ainsi la possibilité de cent mondes. Chacun de ces cent mondes possède les dix facteurs et opère au sein de chacun des trois domaines d’existence, ce qui conduit à trois mille mondes. En d’autres termes, tous les phénomènes sont contenus dans un seul instant de vie, et un seul instant de vie pénètre les trois mille domaines d’existence, c’est-à-dire le monde phénoménal dans son intégralité.
  • *4Traduit de l’anglais. Rabindranath Tagore (1861-1941), Wings of Death: The Last Poems of Rabindranath Tagore (Les ailes de la mort, Derniers poèmes de Rabindranath Tagore), London, John Murray, 1960, p. 69.
  • *5Rabindranath Tagore, Gitanjali (L’Offrande lyrique), traduction par André Gide, NRF, 1917.
  • *6Terre de la lumière éternellement paisible : ou Terre de la lumière paisible. La Terre de bouddha exempte d’impermanence et d’impureté. Dans nombre de sûtras, le monde actuel saha où vivent les êtres humains est décrit comme une terre impure, pleine d’illusions et de souffrances, tandis que la Terre de bouddha est décrite comme une terre pure libérée de ces impuretés et très éloignée de ce monde saha. Par opposition, le Sûtra du Lotus révèle que le monde saha est la Terre de bouddha, ou Terre de la lumière éternellement paisible, et explique que la nature d’une terre est déterminée par l’esprit de ses habitants.