Volume 30 : Chapitre 6, Serment 91–100

Serment 91

Le président de Colombie, M. Gaviria, accueillit chaleureusement Shin’ichi Yamamoto et lui remit une haute distinction de son pays, le grade de grand-croix dans l’ordre de San Carlos.

Le même jour, Shin’ichi participa à la cérémonie d’inauguration de l’exposition « Trésors éternels du Japon », durant laquelle il reçut pour sa contribution à la culture une médaille des mains du directeur général de l’Institut culturel colombien du ministère de l’Éducation.

Puis, le 9 février, Shin’ichi prit un avion pour Rio de Janeiro, au Brésil.

Un homme âgé attendait l’arrivée de Shin’ichi depuis deux heures déjà, à l’aéroport de Rio.

D’épais cheveux blancs encadraient son visage marqué par des rides, qui témoignaient des luttes courageuses qu’il avait menées. En raison de son âge avancé, sa démarche était légèrement instable, mais son allure résolue semblait démentir ses 94 ans. On aurait dit un lion indomptable. Cet homme était Austregésilo de Athayde, le président de l’Académie brésilienne des lettres, un haut lieu de la pensée et de la culture en Amérique latine. C’était l’une des institutions qui avaient invité Shin’ichi au Brésil.

Après avoir achevé ses études de droit à Rio de Janeiro, alors capitale du Brésil, M. Athayde devint journaliste. Dans les années 1930, il lutta contre la dictature au pouvoir. Il fut emprisonné et même contraint de vivre en exil pendant trois ans. Après la Seconde Guerre mondiale, il représenta son pays lors de la troisième assemblée générale des Nations unies [en 1948], où il joua un rôle important aux côtés de la défenseure des droits humains, Eleanor Roosevelt, du lauréat français du prix Nobel de la paix, René Cassin, ainsi que d’autres, dans la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Par la suite, il poursuivit son combat contre la discrimination en tant que chroniqueur pour la presse écrite et, même après avoir été nommé directeur de l’Académie brésilienne des lettres, il continua à militer à travers ses écrits.

M. Athayde entendit parler de Shin’ichi par un ami qui vivait en Europe. En lisant ses livres et en parlant avec des membres de la SGI-Brésil, il développa un vif intérêt et une forte sympathie pour les pensées et les actions de Shin’ichi, et souhaita vivement le rencontrer en personne.

À l’aéroport, M. Athayde attendait donc impatiemment l’arrivée de Shin’ichi.

Préoccupé par sa santé, un responsable de la SGI lui proposa de s’asseoir pour se reposer un peu. Mais M. Athayde répondit simplement : « En fait, cela fait quatre-vingt-quatorze ans que j’attends cette rencontre avec le président Yamamoto. Alors, une ou deux heures de plus ne sont rien. »

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Shin’ichi Yamamoto arriva à l’aéroport de Rio de Janeiro à 21 heures, le 9 février. Le président de l’Académie brésilienne des lettres, Austregésilo de Athayde, et ceux qui l’accompagnaient accueillirent Shin’ichi et son groupe avec des sourires chaleureux.

Né en 1898, M. Athayde était un contemporain du maître de Shin’ichi, Josei Toda, lui-même né en 1900. En voyant M. Athayde, Shin’ichi pensa à son maître. Il avait l’impression que c’était lui qui se trouvait là pour l’accueillir.

M. Athayde et Shin’ichi se saluèrent et tombèrent dans les bras l’un de l’autre, dans une étreinte amicale.

« Président Yamamoto, vous êtes une figure marquante de ce siècle. Œuvrons ensemble à changer l’histoire de l’humanité ! »

Shin’ichi fut touché par un si généreux éloge. Les paroles de M. Athayde traduisaient bien ses aspirations profondes et ses attentes pour l’avenir. Il souhaitait vivement que les droits humains de tous les peuples soient protégés.

« Vous êtes mon compagnon ! Vous êtes mon ami ! Vous êtes un trésor pour notre monde », répondit Shin’ichi.

Partout sur la planète, se dressent les murs de la discrimination. Les droits humains sont méprisés et bafoués à cause de l’autoritarisme, du pouvoir de l’économie, et de la force brute. Pour faire de l’esprit de la Déclaration universelle des droits de l’homme une réalité, l’humanité a un long et difficile chemin à parcourir. M. Athayde cherchait sincèrement des personnes à qui transmettre le relais pour accomplir cette tâche.

Le lendemain, 10 février, Shin’ichi participa à la réunion des représentants de la SGI-Brésil de Rio de Janeiro. Le surlendemain, 11 février, marquait le 93e anniversaire de la naissance de Josei Toda et, en ayant cela à l’esprit, il cita un encouragement de son maître sur la manière de mettre en pratique le bouddhisme dans la vie quotidienne et dans la société : « M. Toda a dit : “Certains ont l’idée simpliste que, parce qu’ils ont le Gohonzon, ils recevront à coup sûr des bienfaits, même s’ils ne prennent pas le temps de réfléchir à la façon de gérer leurs affaires et s’ils ne font aucun effort. C’est une grave erreur que l’on doit qualifier d’offense à la Loi [parce qu’elle va à l’encontre des enseignements du bouddhisme1]”. »

Toda soulignait que le bouddhisme de Nichiren ne nous enjoint pas à croire en une force supérieure ou à en dépendre. Le bouddhisme, dit-il, nous enseigne au contraire à créer des valeurs par nous-mêmes en faisant surgir notre sagesse et notre force inhérentes par la récitation de Nam-myoho-renge-kyo devant le Gohonzon, et à poursuivre notre développement en faisant un usage positif de cette sagesse et de cette force.

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Souhaitant ardemment le bonheur des membres, Shin’ichi dit : « Commentant la phrase de Nichiren “[…] celui qui connaît le Sûtra du Lotus comprend le sens de toutes les affaires de ce monde” (Écrits, 381), M. Toda déclara que c’était une grave erreur d’interpréter ce passage comme s’il signifiait que nous pouvons obtenir des bienfaits, sans avoir à fournir aucun effort personnel.

« M. Toda ajouta : “Les personnes qui ne remarquent pas leurs points faibles dans le travail ou qui ne cherchent pas les moyens de s’améliorer devraient sérieusement s’interroger sur elles-mêmes. Il est essentiel de continuer d’étudier et de mieux connaître son domaine d’activité pour progresser. Mon souhait est que vous, mes chers compagnons, vous arriviez à comprendre le sens de toutes les affaires de ce monde aussi rapidement que possible dans votre contexte professionnel, afin de mener une vie stable2.”

« Le souhait de M. Toda est aussi le mien. Aujourd’hui, les vents de la récession économique soufflent avec rage partout dans le monde. Nous ne devons pas simplement nous lamenter de la situation, mais plutôt faire surgir une sagesse et une force vitale puissantes grâce à notre pratique bouddhique, afin de surmonter avec brio ces conditions difficiles. C’est ainsi que l’on peut devenir “celui qui comprend le sens de toutes les affaires de ce monde” (cf. Écrits, 381).

« Agir nonchalamment en pensant que les choses s’arrangeront simplement parce que nous avons foi en la Loi merveilleuse est une erreur. C’est parce que nous pratiquons le bouddhisme de Nichiren que nous devons prier sérieusement afin de trouver une solution à chaque problème qui se dresse devant nous et agir en conséquence. Cette détermination sincère et cet esprit de défi feront apparaître une sagesse sans égale. Utiliser l’immense pouvoir de la sagesse générée par la foi est la clé pour remporter la victoire en toutes choses. »

C’est un 11 février, jour anniversaire de la naissance de Josei Toda, que le dernier épisode de La Révolution humaine, roman en douze volumes dans lequel Shin’ichi décrivit les actions de son maître pour kosen rufu, fut publié dans le journal Seikyo.

Shin’ichi avait commencé à écrire son roman à Okinawa, le 2 décembre 1964, et sa parution en feuilleton dans le journal Seikyo avait débuté le 1er janvier 1965. Au fil des années, il y avait eu de longues pauses dans la publication du roman en raison des voyages outre-mer de Shin’ichi ou de sa mauvaise santé, mais il avait achevé de l’écrire le 24 novembre 1992, et le dernier épisode, le 1 509e, avait été imprimé le 11 février 1993. À la fin de cet épisode, il avait écrit : « Dédié à mon maître, Josei Toda. »

La Révolution humaine incarnait le serment du disciple, Shin’ichi Yamamoto, de réaliser kosen rufu et constituait l’expression de sa reconnaissance envers son maître.

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Le 11 février, Shin’ichi Yamamoto participa à une cérémonie au cours de laquelle il reçut un doctorat honoris causa de l’université fédérale de Rio de Janeiro.

Dans son discours d’acceptation, il déclara que ce jour marquait l’anniversaire de la naissance de Josei Toda et il parla de la philosophie de son maître : « Mon maître m’a enseigné la philosophie selon laquelle tous les êtres humains, sans exception, peuvent révéler également le trésor suprême qu’ils possèdent de manière intrinsèque. Il m’a confié la voie royale de la paix, qui consiste à engager sans cesse des dialogues sincères et à élargir la solidarité entre les êtres humains. J’ai également hérité de sa vision de la nature humaine – lorsque nous nous consacrons avec passion et détermination au bonheur des personnes ordinaires, une sagesse illimitée jaillit de notre vie.

« Peu après la fin de la Seconde Guerre mondiale, mon maître invita les jeunes à adopter l’idéal de la citoyenneté mondiale. À l’époque, personne ne prêta attention à sa vision de l’avenir, mais le monde actuel, ravagé par l’intensification des conflits ethniques, commence à rechercher cette voie de la coexistence harmonieuse. »

Shin’ichi souhaitait faire connaître la grandeur de Josei Toda au monde entier. Il souhaitait aussi dédier le doctorat honoris causa qu’il venait de recevoir à son maître, qui l’avait soutenu et instruit.

Le lendemain, 12 février, Shin’ichi visita l’Académie brésilienne des lettres à Rio de Janeiro. Là, il eut l’occasion d’en rencontrer le président, Austregésilo de Athayde. Au cours de leur conversation, ils décidèrent d’un commun accord de réaliser ensemble un livre de dialogue qui s’intitulerait Les Droits humains au XXIe siècle. C’était un projet qu’ils avaient déjà évoqué précédemment.

Ils décidèrent que, pour lancer ce dialogue, Shin’ichi préparerait plusieurs questions écrites qu’il transmettrait au président Athayde.

« Je me réjouis, dit M. Athayde, d’engager un dialogue avec vous, président Yamamoto, qui comprenez si profondément les questions relatives aux droits humains. La Déclaration universelle des droits de l’homme a certes déjà été publiée, mais c’est vous qui en traduisez et qui en répandez l’esprit le plus clairement en termes d’actions concrètes. Vos réalisations surpassent celles des rédacteurs de cette déclaration. L’action est primordiale. Il est aussi essentiel d’avoir une philosophie solide. Menons à bien notre dialogue ! »

Shin’ichi renouvela sa détermination, totalement décidé à répondre aux grandes attentes de M. Athayde.

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D’une voix douce qui laissait cependant transparaître une passion intense, M. Athayde dit à Shin’ichi : « Je suis presque centenaire, et c’est la première fois de ma vie que je souhaite autant rencontrer quelqu’un.

« Vous avez une grande mission. Vous êtes une personne perspicace et humaniste ainsi qu’un maître spirituel.

« Tout ce que vous avez fait dans votre vie est chargé de sens. La destinée du monde a, de façon graduelle mais significative, commencé à s’améliorer grâce à vos actions. Vous êtes de ceux qui changent l’histoire de l’humanité.

« Je suis profondément impressionné par les efforts que vous faites pour concrétiser vos idéaux. »

Shin’ichi sentit que les grandes attentes du président Athayde à son égard étaient l’expression de son désir fervent de voir s’incarner l’esprit de la Déclaration universelle des droits de l’homme.

En regardant Shin’ichi droit dans les yeux, le président Athayde déclara : « Un nouveau siècle approche à grands pas. Je crois que cela signifie l’aube d’une ère nouvelle pour le Brésil et le Japon, et même pour le monde entier.

— Oui, je le crois aussi, répondit Shin’ichi. Vous avez lutté pour créer cette nouvelle ère, comme je l’ai fait moi-même. Notre objectif est de permettre l’avènement d’une nouvelle ère où toutes les personnes pourront vivre heureuses. »

Les paroles de Shin’ichi éveillèrent un sourire sur le visage de M. Athayde, qui dit avec détermination : « En latin, “mot” se dit verbum, ce qui signifie aussi “dieu”. Continuons de lutter en faisant des mots nos plus grandes armes ! »

Il y avait une puissante et profonde harmonie entre les esprits des deux hommes.

Après sa rencontre avec le président Athayde, Shin’ichi participa à une cérémonie à l’Académie brésilienne des lettres où il fut nommé membre associé étranger.

Cette académie avait été fondée en 1897 – quand le pays passa du stade de monarchie constitutionnelle à celui de république – dans l’intention de devenir le phare éclatant de l’intelligence et de la sagesse au Brésil. Elle est composée de quarante membres brésiliens et de vingt membres associés étrangers, tous nommés à vie.

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Parmi les associés étrangers nommés officiellement membres de l’Académie brésilienne des lettres pour leurs qualités de « nobles gardiens de la culture et de la littérature » figuraient des géants intellectuels tels que l’écrivain russe Léon Tolstoï, le romancier français Émile Zola et le sociologue britannique Herbert Spencer.

Shin’ichi Yamamoto était le premier Japonais et même le premier Asiatique à recevoir ce titre.

Le ministre de la Culture et représentant du président de la République brésilienne, Antônio Houaiss, ainsi que d’autres personnalités éminentes des cercles culturels et littéraires du Brésil assistèrent à la cérémonie d’intronisation. Le président de la République Itamar Franco envoya lui-même un message de félicitations.

Pendant la cérémonie, Shin’ichi reçut également la médaille Machado de Assis. Cette médaille, à laquelle on avait donné le nom du premier président de l’Académie brésilienne des lettres, était la plus haute distinction délivrée par cette académie. Elle était réservée aux « personnalités culturelles dont les réalisations avaient une signification de portée mondiale ».

Shin’ichi délivra ensuite une conférence intitulée « L’aube de l’espoir pour une civilisation humaniste ».

Il y indiqua que les progrès scientifiques et technologiques créaient une accélération constante du rythme de la mondialisation, engendrant ainsi la nécessité d’une religion qui cultive et élève la spiritualité humaine, tout en apportant les fondements d’un nouvel ordre universel harmonieux. Une telle religion sera le pilier de la civilisation mondiale au XXIe siècle, suggéra-t-il.

Les journalistes des principaux organes de presse brésiliens assistèrent à l’événement et rapportèrent la nomination de Shin’ichi en tant que membre associé étranger, ainsi que le contenu de sa conférence.

Shin’ichi considérait tous les honneurs qui lui avaient été décernés au Brésil, notamment par l’Académie brésilienne des lettres, comme un témoignage éclatant de la victoire des membres de la SGI-Brésil, qui avaient apporté des contributions à leur société et œuvré avec succès à mieux faire comprendre la Soka Gakkai à leurs concitoyens.

Dans le passé, les malentendus et les préjugés à l’encontre de la Soka Gakkai avaient empêché Shin’ichi d’obtenir un visa d’entrée dans le pays, mais, en ce jour, il bénéficiait du plus grand hommage et de la plus haute manifestation de confiance de la part de la première institution intellectuelle d’Amérique latine à travers cette nomination en tant que membre associé étranger.

Nos efforts quotidiens imperceptibles peuvent changer la société.

« Viva Brazil ! » s’écria Shin’ichi, en louant sincèrement dans son cœur chaque membre de la SGI-Brésil.

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Le 14 février, Shin’ichi Yamamoto quitta Rio de Janeiro pour effectuer sa première visite en Argentine.

Peu après leur rencontre, le président de l’Académie brésilienne des lettres, M. Athayde, tomba malade, mais son état de santé n’atténua en rien son désir enthousiaste de poursuivre son dialogue avec Shin’ichi. Lorsqu’il se rétablit vers la mi-juin, il enregistra oralement ses réponses aux questions et aux réflexions transmises par Shin’ichi. Comme s’il engageait une lutte contre le peu de temps qui lui était imparti, M. Athayde rassembla tout ce qui lui restait d’énergie pour exprimer ce qu’il souhaitait communiquer. Jusqu’à son dernier souffle, il consacra sa vie à lutter pour les droits humains de l’ère à venir.

Shin’ichi et le président Athayde poursuivirent leur dialogue en échangeant des lettres où ils abordaient plus spécifiquement les sujets qu’ils avaient décidé de traiter lors de leur rencontre à Rio de Janeiro. M. Athayde envoya sa dernière lettre mi-août. Quelques jours plus tard, il fut hospitalisé et, le 13 septembre 1993, juste avant son 95e anniversaire, la vie remarquable de ce grand héros des droits humains s’acheva.

Après avoir été publié en feuilleton dans Ushio, un magazine affilié à la Soka Gakkai, le dialogue parut en japonais sous forme de livre le 11 février 1995. Son titre était Nijuisseiki no Jinken o Kataru (Les Droits humains au XXIe siècle).

Le 15 février, au lendemain de son arrivée à Buenos Aires, Shin’ichi rencontra à son hôtel l’ancien secrétaire général de la présidence de la République, Alberto Kohan, puis assista à la réunion des représentants de la SGI-Argentine, qui se déroulait dans la capitale argentine.

Parmi les participants se trouvaient des jeunes femmes et des jeunes hommes, le teint hâlé et pleins d’énergie, qui préparaient le 11e festival culturel de la jeunesse pour la paix mondiale de la SGI, prévu le 18 février.

Les membres de la jeunesse argentine s’étaient également beaucoup développés, ouvrant à l’infini la voie de l’avenir de kosen rufu.

Le soir du 15 février en Argentine correspondait, au Japon, au matin du 16 février, jour anniversaire de la naissance de Nichiren. Shin’ichi s’adressa avec vigueur aux personnes réunies : « Quand le Soleil se lève dans le ciel à l’est, sa grande lumière illumine le monde entier. De la même manière, Nichiren est né au Japon, et son bouddhisme du soleil illuminera avec éclat tous les peuples de notre planète, en diffusant la grande lumière bienveillante de la Loi merveilleuse. Les activités que vous menez ici, en Argentine, témoignent magistralement du caractère international et universel du bouddhisme de Nichiren. »

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Shin’ichi Yamamoto poursuivit, d’un ton plein d’énergie : « L’Argentine et le Japon se trouvent aux deux extrémités du globe. Une grande distance les sépare, mais, aujourd’hui, c’est ici, en Argentine, que nous célébrons ensemble l’anniversaire de la naissance de Nichiren. Je suis sûr qu’il s’en réjouirait.

« Un proverbe argentin dit que le Soleil brille pour tout le monde. Le bouddhisme du soleil, fondé par Nichiren, est le bouddhisme de l’égalité. Nichiren exposa son grand enseignement pour tous les êtres humains – pour tous ceux qui vivent pendant les dix mille ans et plus de l’époque de la Fin de la Loi. Ce bouddhisme est dépourvu de toute intolérance ou discrimination, car il ne fait aucune distinction entre les personnes, selon qu’elles le pratiquent ou non.

« J’espère que, avec un grand cœur et un esprit aussi rayonnant que le Soleil, vous répandrez la lumière de l’espoir dans toute l’Argentine, et auprès de tous ses habitants. »

Shin’ichi continua à encourager les membres avec l’esprit que « maintenant est le dernier instant de sa vie » (Écrits, 217). Il cita les mots du célèbre poète argentin Almafuerte : « Parfois un grand destin en sommeil est réveillé par la souffrance3. »

« Le bouddhisme enseigne que la souffrance est un tremplin vers l’illumination. Aucune personne, aucune famille, aucune région n’est à l’abri des problèmes et des soucis.

« La vie est une lutte contre les problèmes. L’essentiel, c’est la façon dont nous surmontons les diverses difficultés et souffrances qui pèsent sur nos épaules. Nous devons faire appel à toute notre sagesse et fournir des efforts répétés pour les surmonter afin de parvenir à la victoire qui se profile derrière les obstacles.

« Rêver à ce que pourrait être votre vie si seulement vous n’aviez pas de difficultés revient, en fin de compte, à fuir la réalité pour vous évader dans un monde imaginaire. Cela ne mène qu’à la défaite. Les personnes qui déploient toujours des efforts dans un esprit positif et réfléchissent à la façon de surmonter chaque problème pour le transformer en une source de création de valeurs et de victoire sont les gagnants dans la vie.

« Votre vie dépend de votre détermination. J’espère que vous incarnerez brillamment ce principe en devenant les grands acteurs d’épopées victorieuses, et que vous encouragerez ceux qui vous entourent en leur donnant confiance en eux. »

Shin’ichi souhaitait que tous les membres d’Argentine, sans exception, soient d’intrépides vainqueurs.

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Le 16 février à midi, Shin’ichi Yamamoto rencontra le président de la République argentine, Carlos Menem, au palais présidentiel, à Buenos Aires.

Au cours de leur conversation, Shin’ichi souligna l’importance de faire du XXIe siècle une ère où les êtres humains s’uniraient et où s’épanouirait une culture de dimension mondiale. Il exprima son grand espoir de voir l’Argentine, pays multiculturel et multiethnique, contribuer à ces objectifs grâce à son esprit cosmopolite et dynamique.

Ce voyage en Amérique latine fut marqué par une succession ininterrompue d’événements et de rencontres officielles avec les dirigeants de chaque pays visité. Les interprètes et traductrices en espagnol, qui firent de bout en bout un travail remarquable, étaient toutes des filles d’immigrés japonais qui avaient grandi en Argentine.

Elles avaient hérité de l’esprit de la foi en participant au groupe des Fifres et Tambours et à d’autres activités de la Soka Gakkai, grâce auxquels elles avaient approfondi leur souhait de consacrer leur vie à kosen rufu pour le bonheur de l’humanité.

Elles avaient étudié dans des universités nationales en Argentine et avaient aussi bénéficié de bourses du gouvernement japonais pour les étudiants étrangers, qui leur avaient permis d’étudier également au Japon. En plus de leurs domaines d’étude spécifiques, elles avaient ainsi perfectionné leurs compétences linguistiques en japonais, et devinrent plus tard des interprètes officielles de la SGI.

Le serment qui s’enracine dans le cœur d’une jeune personne est comme une graine qui, en poussant, devient l’arbre majestueux de sa mission et s’élève dans le ciel.

Le soir du 16 février, Shin’ichi se rendit au Sénat et à la Chambre des députés.

Le Congrès national, qui abrite les deux assemblées, était un grand bâtiment de style gréco-romain achevé en 1906. Il avait été fermé quand la dictature militaire avait suspendu le corps législatif et mis un terme à ses activités, mais, lorsque la dictature prit fin, en 1983, ce bâtiment retrouva sa fonction et devint un symbole de la renaissance de la démocratie en Argentine.

Le Sénat argentin remit à Shin’ichi un certificat rendant hommage à « ses efforts inlassables pour la paix », tandis que la Chambre des députés fit l’éloge de « sa lutte en faveur de la paix pour les peuples du monde ».

Même dans ce pays situé aux antipodes du Japon, les gens écoutaient la parole de Shin’ichi et observaient ses actions. C’était aussi le résultat des efforts constants des membres de la SGI-Argentine pour engager des dialogues sincères et établir des liens de confiance.

Shin’ichi tenait à les remercier profondément pour leurs magnifiques contributions et à partager avec eux les honneurs qu’il avait reçus.

Serment 100

Au cours de sa conversation avec Shin’ichi Yamamoto, le président du Sénat l’informa que son assemblée avait adopté un projet de loi fondé en partie sur l’une des propositions pour la paix de Shin’ichi.

Ce texte établissait la création d’un « Jour de la paix » ainsi que des cours de formation à la paix dans les écoles élémentaires et secondaires. Il instituait aussi divers événements en rapport avec la paix.

Dans la notice explicative de la nouvelle loi, il était dit : « Un penseur japonais de renom a résumé comme suit les défis de l’époque dans laquelle nous vivons […]. » Puis venait un extrait de la proposition pour la paix du Jour de la SGI 1983, publiée par Shin’ichi – cité nommément –, dans lequel il disait :

« Nous devons empêcher la guerre de détruire l’avenir éclatant des personnes qui seront au cœur de l’action au XXIe siècle. Si nous voulons que nos enfants aient un avenir, nous, citoyens ordinaires du monde, devons faire le choix de la sagesse et prendre en compte les aspirations pacifiques de tous les peuples4. »

Cette nouvelle loi entra en vigueur en août 1985.

« Vous mettez l’accent sur le fait que la paix n’est pas simplement l’absence de guerre, poursuivit le président du Sénat. Cela envoie, je crois, un message qui appelle à l’établissement d’un monde où les êtres humains bénéficieront du respect qu’ils méritent et pourront vivre dans la dignité. Heureusement, la guerre froide a pris fin, mais guerres et conflits sévissent encore dans de nombreuses régions du globe. Je crois que c’est dans vos activités et dans celles de la SGI que nous pouvons trouver les principes directeurs et les valeurs dont nous avons besoin pour résoudre tous ces conflits. »

Partout dans le monde, les gens fondent de très grands espoirs dans la SGI. Les personnes qui accompagnaient Shin’ichi sentaient profondément que leur mouvement pour la paix, fondé sur la philosophie du respect de la dignité de la vie du bouddhisme de Nichiren, correspondait aux attentes de l’époque.

Le lendemain, 17 février, Shin’ichi assista à une cérémonie au cours de laquelle il reçut un doctorat honoris causa et le titre de professeur honoraire de droit de l’université nationale de Lomas de Zamora. Il fut annoncé en cette occasion que l’assemblée législative de la province de Buenos Aires avait adopté une résolution reconnaissant la visite de Shin’ichi en Argentine comme un événement officiel, et dix villes de la province lui remirent une plaque commémorative ou les clés de leur ville.

  • *1Traduit du japonais. Josei Toda, Toda Josei Zenshu (Œuvres complètes de Josei Toda), Tokyo, Seikyo Shimbunsha, 1981, vol. 1, p. 161.
  • *2Idem., p. 162.
  • *3Traduit de l’espagnol. Almafuerte, Obras Completas (Œuvres complètes), Buenos Aires, Editions Claridad S.A., 1990, p. 62.
  • *4Daisaku Ikeda, « Nouvelles propositions pour la paix et le désarmement », Pour une spiritualité créatrice de paix, éditions du Rocher, 1990, vol. 2, p. 203,