Volume 30 : Chapitre 3, Nouvel élan 11–20
Nouvel élan 11
Le soir du 26 avril, à l’hôtel Ronghu où il résidait, Shin’ichi Yamamoto rencontra Li Luogong, président de l’Académie artistique de Guilin et professeur à l’Institut des arts du Guangxi. Le président Li avait étudié au Japon et était lui-même un grand peintre, calligraphe et graveur de sceaux.
Ils discutèrent avec enthousiasme de calligraphie et de peinture, et Shin’ichi fut profondément marqué par une remarque du président Li : « En calligraphie, il ne s’agit pas d’écrire pour écrire. La calligraphie émane de nos pensées et de nos sentiments, et exprime notre vision du monde et de l’univers, ainsi que notre personnalité. »
Trente ans plus tard, en avril 2010, l’Institut des arts du Guangxi conféra à Shin’ichi le titre de professeur honoraire à vie.
Le matin du 27 avril, la délégation de la Soka Gakkai quitta Guilin, traversa la province de Guangzhou et parvint à Shanghai dans la soirée. C’était la dernière étape de leur visite en Chine.
Le lendemain matin, Shin’ichi assista à une cérémonie organisée dans le gymnase de Shanghai, où la délégation qu’il dirigeait offrit des équipements sportifs à la ville. Dans l’après-midi, il se rendit dans une école d’éducation spécialisée du district de Changning, à Shanghai, un internat ayant pour vocation la réinsertion des jeunes de 16 et 17 ans.
Le directeur de l’école fit visiter les classes au groupe de Shin’ichi.
Shin’ichi serra la main des élèves, les uns après les autres, et discuta avec eux. Les jeunes ont un potentiel illimité. Souhaitant que chacun d’eux mène une vie forte et positive, il prit fermement leurs mains dans les siennes et les encouragea de tout son cœur.
« La vie est longue, leur dit-il. Il vous arrivera parfois de connaître des échecs pour une raison ou pour une autre, mais vous ne devez pas laisser cela vous faire perdre espoir. Tant que vous vous lancez des défis, il y a de l’espoir.
« Mais si vous ne croyez plus en vous et tombez dans l’autodestruction, vous étoufferez la lumière de l’espoir par vos propres actes. Quoi qu’il arrive, ne soyez pas vaincus par vous-mêmes. Remporter la victoire sur ses propres faiblesses conduit à remporter la victoire dans tous les domaines.
« Étudiez de toutes vos forces ici même, dans cette école, et remportez la victoire – pour la société, pour vos parents et pour vous-mêmes. Faites de grands progrès, sans jamais vous décourager, et venez un jour au Japon ! »
Il prit de nouveau les mains des jeunes dans les siennes et, en les serrant fort, il leur dit : « Tout est question de persévérance. Ne soyez pas vaincus ! »
Les élèves acquiescèrent, avec des regards brillant de détermination.
Nouvel élan 12
Dans l’après-midi du 28 avril, le président de l’université de Fudan, Su Buqing, rendit visite à Shin’ichi à l’hôtel Jin Jiang, où il séjournait à Shanghai. Shin’ichi s’était rendu à l’université de Fudan en 1975 puis, de nouveau, en 1978, pour effectuer un don de livres. Le président Su Buqing et lui étaient de vieux amis.
Su Buqing était un mathématicien renommé et, ce jour-là, leur conversation porta de nouveau sur les mathématiques et l’éducation. Shin’ichi demanda s’il existait une méthode facile pour enseigner cette matière ardue que sont les mathématiques. La réponse du président impressionna Shin’ichi.
« Quel que soit le domaine, dit-il, le processus consiste à passer du superficiel au profond, du petit au grand, du facile au difficile. Il est possible d’enseigner les mathématiques en expliquant chaque étape du cheminement, avec précision et patience, et en aidant les élèves à maîtriser la matière. »
Le président Su Buqing poursuivit sur un ton énergique : « Autrement dit, celui qui apprend doit avancer pas à pas, sans sauter d’étapes, et maîtriser le sujet peu à peu, en progressant régulièrement. Puis, il doit continuer d’aller de l’avant, en visant l’objectif le plus élevé. Il lui arrivera parfois de penser que c’est une tâche impossible, mais de tels moments sont décisifs. Si vous continuez de persévérer et d’avancer, vous parviendrez à un point où la voie s’ouvre devant vous. On pourrait comparer cela à l’atteinte de l’éveil. »
Quand nous avançons vers un objectif, les obstacles ne manquent pas d’apparaître sur notre chemin, et c’est précisément le moment de vérité où commence la lutte avec soi-même. Si nous parvenons à vaincre notre propre faiblesse intérieure – c’est-à-dire la tendance à abandonner ou à faire des compromis – et continuons d’avancer, la situation changera dans un sens positif. Les vainqueurs sont ceux qui parviennent à la maîtrise de soi.
Les années suivantes, Shin’ichi resta en contact avec Su Buqing. Ils se rencontrèrent six fois pour des dialogues en tête à tête.
En juin 1987, Shin’ichi offrit à Su Buqing, alors président honoraire de l’université de Fudan, un poème intitulé « Le grand fleuve de la paix », pour célébrer l’amitié et la confiance qui les unissaient. Le poème comporte ces vers :
Tout comme un grand fleuve
commence par une seule goutte d’eau,
avançons ensemble, chacun de nous formant une goutte,
pour créer le fleuve Yangtzé de la paix.
Nouvel élan 13
Après son entrevue avec Su Buqing, Shin’ichi rencontra l’écrivain Ba Jin, qui se rendit à son hôtel dans la soirée.
Ba Jin était une figure littéraire éminente en Chine, reconnu dans le monde entier pour certaines de ses œuvres, comme Famille et Nuit glacée. Il était également le premier vice-président de l’Association des écrivains de Chine. C’était leur deuxième rencontre.
Ils s’étaient vus la première fois au centre de séminaires de la Soka Gakkai de Shizuoka, le 5 avril, quelques jours avant le départ de Shin’ichi pour la Chine, alors que Ba Jin était en visite au Japon, à la tête d’une délégation d’écrivains chinois. Bing Xin, une des plus célèbres auteures de littérature chinoise moderne, présidente honoraire de l’Association des écrivains de Chine, et vice-présidente de la délégation en visite au Japon, était aussi présente en cette occasion. Ensemble, ils avaient dialogué avec enthousiasme à propos de la littérature en général et, plus particulièrement, de l’état de la littérature au Japon et d’auteurs japonais comme Murasaki Shikibu (env. 978-env. 1014) et Natsume Soseki (1867-1916).
Six jours après cette rencontre [le 11 avril], Ba Jin participa à une série de conférences [à Kyoto], organisées par le journal Seikyo, le quotidien affilié à la Soka Gakkai. Dans le discours qu’il prononça alors, il déclara : « J’ai écrit pour combattre les ennemis. »
Tout au long de sa carrière, l’auteur chinois avait brandi avec passion sa plume, avec le souhait résolu d’éveiller ceux qui, sous le joug du code féodal régnant en Chine avant la révolution [qui eut lieu durant la première moitié du XXe siècle], étaient prisonniers des souffrances et privés de leur jeunesse.
« Qui sont mes ennemis ? dit Ba Jin. Toutes les notions obsolètes et traditionnelles, toutes les politiques et tous les systèmes irrationnels qui entravent la progression de la société et le développement du potentiel humain, tout ce qui détruit l’amour. »
Il avait 75 ans, mais avait toujours l’esprit rayonnant d’un guerrier qui lutte contre les ennemis du peuple.
« Je suis profondément impressionné par votre jeunesse d’esprit », dit Shin’ichi à Ba Jin [lors de leur rencontre au centre de séminaires de Shizuoka]. « Un des plus grands problèmes auquel le Japon fait face aujourd’hui est que les jeunes, qui devraient être des porte-étendards et des agents du changement, sont devenus indifférents et cèdent à la résignation et à la fuite. L’état actuel de la littérature est en partie responsable de cette situation. Je trouve tout à fait regrettable qu’il y ait si peu d’auteurs et de livres riches en philosophie et en idéaux, qui puissent offrir aux jeunes des principes solides, un grand espoir et des objectifs nobles et éternels dans la vie.
« C’est toujours la jeunesse et le pouvoir des jeunes qui ont changé la société. Ils ont la mission de créer l’avenir et ont véritablement la capacité de le faire. Ils ne doivent pas abandonner. Si tel était le cas, ils gâcheraient leur propre avenir. »
Nouvel élan 14
Durant leur conversation au Japon, Shin’ichi avait dit à Ba Jin et aux autres écrivains chinois en visite : « La prochaine fois, je propose que nous discutions du rapport entre la révolution, la politique ou la paix et la littérature, et d’autres sujets de ce genre. » Tous avaient fait la promesse de se rencontrer de nouveau.
Shin’ichi avait pu revoir Bing Xin lors d’un banquet organisé à Pékin, le 24 avril, pour remercier ses hôtes au cours de son voyage en Chine. Et là, à Shanghai, il eut l’occasion de rencontrer Ba Jin pour la deuxième fois.
Quand Shin’ichi lui demanda son opinion sur les rapports entre politique et littérature, Ba Jin lui répondit sans hésiter : « La littérature ne peut être séparée de la politique. Mais la politique ne pourra jamais remplacer la littérature. La littérature peut former l’esprit humain, alors que la politique ne le peut pas. »
Ils évoquèrent ensuite la Révolution culturelle chinoise.
Pendant la Révolution culturelle, Ba Jin fut classé dans la catégorie des contre-révolutionnaires et exclu de la sphère littéraire. Des milliers d’affiches le condamnant furent collées sur les murs, et il fut dénoncé comme traître. L’écrivain chinois a indiqué qu’il était important pour lui de faire un bilan des épreuves douloureuses qu’il avait traversées, en s’analysant lui-même, et de révéler clairement ce qui s’était passé à cette époque.
Dans la conférence qu’il avait délivrée un peu plus tôt au Japon [le 11 avril], il avait déclaré : « Je dois écrire. Je dois continuer d’écrire. Pour cela, il faut que je devienne une personne meilleure, plus utile, et d’une plus grande pureté.
« Ma vie s’achèvera bientôt. Je ne veux pas partir sans avoir accompli ce que je dois accomplir. Je dois écrire ; je ne peux pas lâcher mon stylo. Quand j’écris, j’allume un feu dans mon cœur, et quand les flammes réduiront mon corps en cendres, mon amour et ma haine resteront à jamais en ce monde. »
Nous ne devons pas ignorer les injustices. Nous devons examiner minutieusement leurs causes et leur quintessence, et engager la lutte pour un avenir meilleur.
Dans sa conversation avec Shin’ichi, Ba Jin dit : « J’ai commencé un roman sur la Révolution culturelle. J’ai l’intention de prendre mon temps pour l’écrire. »
Un esprit qui lutte en faveur de la vérité et de la justice peut permettre d’établir une société nouvelle.
Nouvel élan 15
Lorsqu’ils se rencontrent pour la première fois, les gens font connaissance ; puis ils multiplient les échanges et se lient d’amitié ; ensuite, grâce à des attentions sincères et une empathie mutuelle, ils approfondissent leur amitié.
Shin’ichi et Ba Jin restèrent en contact et forgèrent entre eux des liens de grande confiance et une forte amitié.
Plus tard, Ba Jin devint le président de l’Association des écrivains de Chine. En novembre 2003, cette association, en lien avec la Fondation pour la littérature chinoise, rendit hommage à Shin’ichi en lui conférant le Prix international de littérature pour la compréhension et l’amitié.
Deux ans plus tard, en 2005, Ba Jin mourut à l’âge de 100 ans.
Quant à Bing Xin, elle était décédée en 1999, à l’âge de 98 ans. Deux ans plus tôt, en 1997, la Société de recherche Bing Xin, présidée par Ba Jin, avait créé le musée littéraire Bing Xin à Changle, dans la province de Fujian, pour préserver et promouvoir son héritage. En septembre 2004, ce musée remit à Shin’ichi le titre de directeur honoraire, et, à sa femme, Mineko, celui d’ambassadrice de l’amitié.
En réponse à tant de bienveillance, Shin’ichi et Mineko renouvelèrent leur promesse de se consacrer avec davantage d’énergie à promouvoir l’amitié et les échanges culturels et artistiques entre la Chine et le Japon.
La cinquième délégation de la Soka Gakkai en Chine devait rentrer au Japon le 29 avril. Avant son départ, le directeur de l’hôtel Jin Jiang, où le groupe séjournait, demanda à Shin’ichi d’écrire un mot dans le livre d’or de l’hôtel. Shin’ichi inscrivit son nom, suivi de ce poème :
Un pont doré
en cette cinquième visite en Chine
– Ai pensé à Nichiren et à son traité sur Hachiman
Dans son traité intitulé Sur les remontrances à Hachiman, Nichiren écrit : « La Lune se lève à l’ouest et se déplace vers l’est, symbole de la propagation des enseignements bouddhiques de l’Inde vers l’est. Le Soleil se lève à l’est1, signe de bon augure qui atteste que le bouddhisme du Japon est destiné à retourner au pays de la Lune [l’Inde]. » (WND-II, 936) Nichiren prédit ici que le bouddhisme se répandra vers l’ouest.
Il confia à ses disciples des époques à venir la mission d’illuminer l’Asie et le monde avec la lumière humaniste du bouddhisme de Nichiren et de créer le bonheur pour tous. Shin’ichi n’avait pas ménagé ses efforts dans ses voyages pour la paix afin d’accomplir la prophétie de Nichiren.
En tant que bouddhistes, qui luttons pour réaliser notre idéal de « l’établissement de l’enseignement correct pour la paix dans le pays », notre mission sociale consiste à établir une philosophie de bienveillance et de dignité de la vie dans le cœur des êtres humains, en créant une société prospère et une paix mondiale durable.
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Une nouvelle lutte pour le siècle à venir commença.
Le 29 avril, à 13 h 40, Shin’ichi Yamamoto et les membres de la délégation qui l’accompagnaient quittèrent l’aéroport international de Shanghai Hongqiao pour revenir au Japon.
Shin’ichi se rendit à Nagasaki, sur l’île de Kyushu. Il était déterminé à y engager encore une lutte pour ouvrir une nouvelle voie vers kosen rufu. Le temps était maintenant venu, et il prit la ferme décision de briser les chaînes imposées par les intrigues des anciens membres qui avaient tourné le dos à la Soka Gakkai et par les moines de la Nichiren Shoshu qui désiraient couper les liens entre le maître et ses disciples au sein du mouvement Soka. Avec cet objectif en tête, Shin’ichi décida, après son retour de Chine, de participer aux cérémonies de Gongyo et à d’autres réunions à Nagasaki, Fukuoka, Osaka, Nagoya et ailleurs, et d’y encourager de tout son cœur les membres.
Il était tout à fait conscient que ces actions déclencheraient une réaction hostile de la part des forces démoniaques qui cherchent à détruire kosen rufu, mais il était déterminé, quoi qu’il advienne, à protéger les membres qui souffraient des attaques mesquines et malintentionnées des moines autoritaires.
Ce jour-là, un magnifique arc-en-ciel se déploya dans le ciel au-dessus de l’aéroport de Nagasaki. L’avion de Shin’ichi et de son groupe atterrit peu après 16 h 30, le 29 avril.
Shin’ichi s’arrêta un instant sur la passerelle de l’avion avant de descendre. Une grande banderole où était écrit « Félicitations pour le grand succès de la cinquième délégation de la Soka Gakkai en Chine » flottait sur la terrasse de l’aéroport. Des membres de la Soka Gakkai, venus en grand nombre, firent de grands signes de la main à Shin’ichi et à son groupe pour saluer leur retour.
Shin’ichi répondit à leurs signes. À partir de cet instant, il allait renouveler ses efforts pour encourager les membres.
Tsuguya Umemori, le responsable de la préfecture de Nagasaki, était tout sourire mais, au moment où Shin’ichi lui serra la main, il fut submergé par l’émotion et ses yeux s’embuèrent de larmes. La ville d’Omura, où se situe l’aéroport de Nagasaki, était l’un des lieux où les membres avaient fait l’objet d’intimidation et de harcèlement de la part des moines de la Nichiren Shoshu. En retenant leurs larmes amères, les membres avaient attendu patiemment ce jour.
Shin’ichi leur lança un appel : « Le lion est là ! Tout ira bien. Ne vous inquiétez pas. »
Une responsable du département des jeunes femmes lui dit « Bienvenue Sensei ! » et lui offrit un bouquet.
« Merci ! » s’exclama Shin’ichi, puis il ajouta à l’attention de toutes les personnes présentes : « Nous allons prendre un nouveau départ. Le long voyage de kosen rufu vient de commencer. Ouvrons la voie de l’avenir ! »
Tant que nous continuerons d’aller de l’avant, il y aura des lendemains pleins d’espoir. Tant que nous ferons preuve de passion et de combativité, l’avenir sera ensoleillé et radieux.
Nouvel élan 17
Shin’ichi quitta l’aéroport pour se rendre au centre culturel de Nagasaki. C’était sa première visite dans cette préfecture en douze ans.
Tsuguya Umemori, le responsable de la préfecture de Nagasaki, lui expliqua qu’une réunion de responsables avait lieu ce jour-là pour célébrer le 22e anniversaire de la création du chapitre Nagasaki. Shin’ichi se dirigea directement vers la salle de réunion. Les membres l’accueillirent avec une salve d’applaudissements.
« Quelle joie de vous retrouver ! » dit Shin’ichi. « Lançons un ban pour fêter la victoire de Nagasaki face aux tempêtes de l’adversité ! »
Puis Umemori proposa aux participants de faire un ban pour la Soka Gakkai de Nagasaki.
Shin’ichi expliqua qu’il devait partir rapidement, car il allait donner une conférence de presse dans un hôtel de la ville à propos de sa visite en Chine, puis il ajouta : « Comment pouvons-nous remporter la victoire dans la vie et devenir heureux ? L’état de bouddha et l’état d’enfer existent tous les deux dans notre cœur. En puisant dans notre état de bouddha, nous pouvons établir un bonheur indestructible. Pour cela, nous devons concentrer notre esprit sur kosen rufu et nous entraîner sans cesse dans notre pratique bouddhique, en priant avec le vœu de réaliser notre bonheur et celui des autres.
« Nichiren a écrit : “Vous ne devez pas seulement persévérer vous-même ; vous devez aussi enseigner aux autres […] Enseignez aux autres au mieux de vos capacités, ne serait-ce qu’une phrase.” (Écrits, 390) Quand nous luttons ardemment pour kosen rufu, en nous efforçant de transmettre la Loi merveilleuse et d’amener d’autres personnes à notre pratique bouddhique, nous manifestons l’état de bouddha illimité inhérent à notre vie et pouvons transformer toutes les souffrances de la vie en une joie profonde. C’est la raison pour laquelle Nichiren a écrit pendant son exil sur l’île de Sado : “[…] même en exil, nous avons de bonnes raisons d’éprouver de la joie, aussi bien dans notre corps que dans notre esprit.” (Écrits, 316)
« Nous, membres de la Soka Gakkai, pouvons certes nous féliciter d’avoir atteint jusqu’à présent notre objectif en ce qui concerne le nombre de pratiquants – d’abord un million, puis un autre, jusqu’à parvenir récemment à l’objectif emblématique de 10 millions de membres –, mais il y a aujourd’hui plus de 4 milliards d’êtres humains sur notre planète. Cela signifie que seule une personne parmi plusieurs centaines est actuellement membre de la Soka Gakkai. Vu sous cet angle, notre mouvement de kosen rufu mondial en est encore à ses premiers balbutiements. Nous venons à peine de commencer. Nos actions prendront toute leur portée au XXIe siècle.
« J’aimerais que vous meniez tous de longues vies. Ensemble, consacrons pleinement notre vie à kosen rufu ! »
Les participants applaudirent, débordant de joie et bien déterminés à réaliser leur vœu pour kosen rufu.
Nouvel élan 18
Après avoir encouragé les participants de la réunion des responsables au centre culturel de Nagasaki, Shin’ichi se hâta de rejoindre l’hôtel où devait avoir lieu la conférence de presse.
Les journalistes présents l’interrogèrent sur la situation en Chine et sur ses impressions à l’occasion de son cinquième voyage dans ce pays.
Après la conférence de presse, Shin’ichi invita à dîner les membres de la délégation qui l’avaient accompagné en Chine pour les remercier.
Revenant alors sur cette visite, il leur dit : « Je crois que notre voyage en Chine a ouvert le rideau sur la paix mondiale dans l’ère à venir. Les deux décennies qui nous séparent du début du XXIe
siècle sont une période d’une importance cruciale pour promouvoir des échanges non seulement entre personnes ordinaires, mais aussi dans les sphères de l’éducation et de la culture. Ils créeront un nouveau courant pour la paix, qui unira le monde.
« Durant cette période, je suis certain que la Chine connaîtra un immense développement, et le monde aussi sera la scène de changements rapides et radicaux. Cela rend d’autant plus impérative la nécessité de communiquer nos idéaux de paix et la philosophie humaniste du bouddhisme de Nichiren à travers le monde. Il est important pour nous de développer un mouvement d’étude bouddhique qui prend ses racines au plus profond des enseignements de Nichiren et de faire connaître dans la société et dans le monde le principe de respect de la vie sur lequel il se fonde.
« À tous points de vue, nous avons atteint aujourd’hui une étape décisive pour l’établissement de la paix au XXIe siècle ; il n’y a pas un moment à perdre. »
À la fin du dîner, un journaliste du Seikyo présent à la conférence de presse dit à Shin’ichi : « En plus de votre retour de Chine, j’aimerais parler dans mon article de votre participation à la réunion des responsables au centre culturel de Nagasaki, célébrant le 22e anniversaire de la création du chapitre Nagasaki. »
« Je n’y vois pas d’objection », répondit Shin’ichi. « Nous n’avons pas à cacher la réalité. En fait, nous ne pourrons pas accomplir kosen rufu si les liens de maître et disciple dans la Soka Gakkai sont coupés et si l’esprit de s’engager ensemble est perdu. C’est pourquoi je me lance dans une nouvelle lutte aux côtés des membres. Vous pouvez également parler de mon programme à venir. Le temps est venu d’entamer une contre-offensive ! La bataille commence ! »
À la une du journal Seikyo du 30 avril figura un article sur le retour de Shin’ichi au Japon, sa conférence de presse et sa participation à la réunion des responsables au centre culturel de Nagasaki. L’article mentionnait ensuite que, après Nagasaki, Shin’ichi avait prévu de se rendre à Fukuoka (également situé dans la région de Kyushu) et dans des villes du Kansai et de Chubu pour y encourager les membres et leur offrir ses orientations.
Les lecteurs furent particulièrement touchés par cette nouvelle. Un puissant élan de joie se propagea dans le cœur des membres de tout le Japon.
Nouvel élan 19
Shin’ichi devait quitter Nagasaki pour se rendre en train à Fukuoka, peu après 13 heures, le 30 avril. Mais il y avait un endroit où il désirait absolument aller avant son départ. C’était chez Kikumaru Obayashi, le secrétaire du département des hommes de la préfecture, qui vivait dans le quartier d’Inasamachi, à Nagasaki.
Lors de la première réunion générale du département de la jeunesse de Kyushu, qui avait eu lieu en mars 1973 à Kitakyushu (au nord de la préfecture de Fukuoka), Shin’ichi avait promis à Obayashi, alors responsable de centre général du département des jeunes hommes, qu’il viendrait chez lui lors d’une prochaine visite à Nagasaki.
Quand Obayashi en parla à sa mère, Shizuyo, elle lui dit d’un ton déterminé : « Que cette visite se réalise ou non dépend de notre foi en tant que disciples. Récitons Daimoku ! » Tous les membres de la famille s’unirent alors pour réciter ensemble des Daimoku sincères. Shizuyo était l’une des membres pionnières du mouvement de kosen rufu à Nagasaki.
Obayashi habitait sur une colline qui surplombait le port de Nagasaki. Shizuyo, Obayashi et ses frères aîné et cadet, ainsi que leurs épouses, accueillirent Shin’ichi. Ils posèrent ensemble pour une photo, puis récitèrent Gongyo.
Shizuyo avait tout spécialement confectionné des coussins afin d’être prête à accueillir à tout moment Shin’ichi. Il lui exprima sa profonde gratitude pour sa sincérité et s’entretint avec toute la famille. Au cours de la conversation amicale, le sujet porta sur sa démission, l’année précédente, de la présidence de la Soka Gakkai et de sa fonction de représentant principal de l’ensemble des organisations laïques de la Nichiren Shoshu.
Shizuyo raconta que, en apprenant la nouvelle à la télévision, elle en avait tremblé d’indignation et s’était écriée : « C’est ridicule ! Il s’agit certainement d’un complot. C’est inacceptable ! »
Elle refusait absolument de tolérer l’injustice, l’ingratitude et toute forme de mal qui puisse détruire kosen rufu. Les actions et discours arrogants des moines de la Nichiren Shoshu avaient suscité en elle indignation et amertume tout au long de l’année précédente, mais elle était déterminée à montrer à tous que la vérité et la justice finiraient par triompher.
Aucune pression extérieure ne pouvait empêcher la source de l’esprit de la Soka Gakkai de surgir avec force dans le cœur des membres.
« Merci ! » dit Shin’ichi. « Vos fils ont hérité de votre esprit. Vous avez remporté la victoire. J’agis librement désormais. Et je reviendrai à Nagasaki. »
Vers la fin de leur conversation arriva une responsable locale du département des jeunes femmes, qui souhaitait recevoir un encouragement personnel. Shin’ichi l’encouragea jusqu’à la dernière minute précédant son départ.
Nouvel élan 20
Quand Shin’ichi Yamamoto arriva à la gare de Nagasaki, un groupe important de membres s’étaient réunis pour le saluer. Tout en veillant à ne pas déranger le personnel de la gare et les autres passagers, Shin’ichi eut avec eux un échange chaleureux. « Merci, je suis bien conscient de tous vos efforts.
« Devenez heureux. Il est important d’avancer en étant entièrement convaincus que vous pouvez parvenir au bonheur. Les bodhisattvas surgis de la Terre qui se consacrent inlassablement à kosen rufu ne peuvent manquer de devenir heureux.
« Travaillons ensemble à construire une nouvelle Soka Gakkai. »
Une fois dans le train, il s’inclina et les salua depuis son siège, poursuivant ainsi un dialogue de cœur à cœur à travers la fenêtre.
Le train express au départ de Nagasaki s’arrêta successivement dans les gares d’Isahaya, Hizen-Kashima, Hizen-Yamaguchi, Saga et Tosu. Des membres de la Soka Gakkai s’étaient réunis dans chacune de ces gares. La visite de Shin’ichi à Fukuoka ayant été rapportée dans le journal Seikyo, il leur avait été relativement facile de savoir quel train il prendrait.
En l’apercevant, la plupart des membres lui adressaient des sourires joyeux et lui faisaient signe de la main. Mais il y en eut aussi certains, sur les quais, qui se cachaient derrière les piliers et le regardaient de loin. Après avoir été si cruellement critiqués par les moines pour l’avoir simplement appelé « Sensei », ils ne souhaitaient pas lui nuire de quelque façon que ce soit. Shin’ichi ressentait une profonde affection pour eux. Il aurait aimé pouvoir sortir du train pour les encourager de toutes ses forces.
Il dit à l’un des responsables qui l’accompagnait : « Ce sont ces membres sans couronne qui ont construit la Soka Gakkai telle que nous la connaissons aujourd’hui. Dans la chaleur accablante de l’été comme dans les tempêtes glaciales de l’hiver, ils ont récité Nam-myoho-renge-kyo en priant pour le bonheur de leurs amis, sont allés à leur rencontre pour dialoguer, et ont ainsi fait progresser notre mouvement de kosen rufu. Ils sont la force motrice qui concrétisera le changement du destin de la société, du pays et, en fin de compte, de toute l’humanité. Chacune et chacun d’eux est un enfant du Bouddha doté d’une noble mission, apparu pour réaliser l’idéal de Nichiren – “l’établissement de l’enseignement correct pour la paix dans le pays”. Je lutterai pour ces personnes !
« Les responsables devraient manifester le plus profond respect à l’égard de ces membres sincères, en les chérissant, en les protégeant et, par-dessus tout, en les encourageant. »
La raison d’être de l’organisation et de ses responsables est de permettre aux membres de devenir heureux.
- *1Cela fait référence au mouvement apparemment rétrograde de la Lune. Bien que la lune se lève à l’est et se couche à l’ouest comme le Soleil, en raison de son orbite autour de la Terre, chaque nuit, elle apparaît un peu plus à l’est dans sa position dans le ciel.