Volume 30 : Chapitre 2, Préparer l’ère à venir 11–20
Préparer l’ère à venir 11
Parmi les personnes avec lesquelles Shin’ichi s’entretint, en ce soir du 21 août, figuraient Torao et Tami Tamori, qui avaient été respectivement les premiers responsables homme et femme du chapitre Karuizawa.
Torao était boulanger et s’était formé en travaillant dans un hôtel de grand standing. Son épouse, Tami, avait souffert d’une maladie cardiaque mais, quand elle adhéra à la Soka Gakkai et se mit à pratiquer le bouddhisme de Nichiren, sa santé s’améliora. Cela incita son mari Torao ainsi que leurs enfants à devenir membres eux aussi, en 1955. Torao put ainsi accomplir le rêve qu’il chérissait depuis longtemps d’acquérir sa propre boulangerie, ce qui lui permit d’approfondir sa conviction dans le pouvoir et les bienfaits de la pratique bouddhique, et il partagea joyeusement le bouddhisme de Nichiren avec son entourage.
Mais nombreux étaient ceux, autour de lui, qui avaient des préjugés contre la Soka Gakkai et désapprouvaient sa foi bouddhique, ce qui lui fit perdre des clients.
Un aîné dans la foi encouragea le couple, perturbé par ce problème. « Nichiren, leur dit-il, nous a laissé cette déclaration très claire : “Si vous […] propagez [cet enseignement], les démons ne manqueront pas d’apparaître. Sinon, il n’y aurait aucun moyen de savoir qu’il s’agit de l’enseignement correct.” (Écrits, 504) Parce que vous vous êtes l’un et l’autre dressés avec courage pour participer à la lutte pour kosen rufu, les fonctions démoniaques et les obstacles sont apparus. N’est-ce pas précisément ce que Nichiren enseigne ?
« Si vous continuez de persévérer avec courage dans la foi, comme vous le faites actuellement, il est certain que vous parviendrez à un état de bonheur authentique. C’est pour cela qu’il est important de ne jamais régresser dans votre foi et dans votre pratique. »
À l’époque, beaucoup de membres étaient, à des degrés divers, confrontés à des problèmes similaires. Ils réagirent en s’engageant avec encore plus de combativité dans leurs activités au sein de la Soka Gakkai. Ils lurent les écrits de Nichiren et s’encouragèrent mutuellement.
Torao pensa : « Nichiren a écrit : “Plus les persécutions qui s’abattront sur lui [le Pratiquant du Sûtra du Lotus] seront grandes, plus il ressentira de joie grâce à la force de sa foi.” (Écrits, 33) Plus la situation comporte des défis et plus nous avons besoin de faire jaillir une foi forte et d’aller de l’avant avec joie et courage. Cela correspond en fait au moment crucial ! »
Les activités de la Soka Gakkai se sont développées en harmonie avec les écrits de Nichiren, et l’étude bouddhique s’est intégrée dans la vie quotidienne de chaque personne. Telle a été la source de la force de résilience de la Soka Gakkai. Rétrospectivement, il apparaît que tout cela a été rendu possible grâce à la publication par Josei Toda du Nichiren Daishonin Gosho zenshu (Les Œuvres complètes de Nichiren Daishonin). C’est ainsi que s’est ouverte une nouvelle époque où l’enseignement correct et les principes du bouddhisme de Nichiren ont constitué un modèle pour des personnes aux modes de vie les plus variés.
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Torao Tamori serra les dents et poursuivit ses efforts dans sa pratique bouddhique. Au bout d’un certain temps, il obtint un contrat pour fournir le pain à une école locale, et il parvint aussi à augmenter le nombre de ses clients non japonais. Par la suite, il devint l’un des fournisseurs d’une grande enseigne de pâtisseries occidentales, et sa boutique devint l’une des boulangeries les plus populaires et les mieux établies de Karuizawa.
Non seulement il montra la preuve factuelle du pouvoir de la pratique bouddhique dans son travail, mais il contribua aussi au développement de son environnement et au bien-être des habitants de sa commune. Son exemple contribua à dissiper les conceptions erronées et les préjugés envers la Soka Gakkai et permit à l’organisation de bénéficier d’une plus large compréhension et d’obtenir davantage de soutien.
Tout en dialoguant avec le couple, Shin’ichi décida d’inviter le lendemain un groupe de membres locaux pour une rencontre informelle dans la cafétéria située à l’étage de la boutique de la famille Tamori.
Lors de cette réunion, Shin’ichi fit part de conversations qu’il avait eues avec Josei Toda à Karuizawa, lors de l’été 1957.
« M. Toda aimait cette région aux paysages si magnifiques, et il a transmis son profond désir qu’y soient organisés un jour des cours d’été. Je sens que, grâce à l’ouverture de ce centre de séminaires, à Karuizawa, nous avons fait un pas de plus vers la concrétisation de la vision de M. Toda.
« En définitive, les membres de tout le Japon et du monde entier finiront par se rassembler dans le centre de séminaires de Nagano, qui deviendra une source d’inspiration dynamique pour kosen rufu. C’est pour cela qu’il est important que vous bâtissiez ici, dans la préfecture de Nagano, une organisation qui constitue un modèle pour le reste du monde. Je vous apporterai tout mon soutien. »
Ce soir-là, se tenait une réunion des responsables des chapitres Karuizawa et Naka-Karuizawa, dans le centre de séminaires de Nagano.
Alors que cette réunion approchait de son terme, Shin’ichi entra dans la salle et se joignit aux membres pour la pratique de Gongyo. Puis il s’assit au piano et interpréta plusieurs chansons pour les encourager, notamment Ureshii Hina-Matsuri (Le joyeux festival des poupées) et Tsuki no Sabaku (Le désert au clair de lune). Enchantés, les participants applaudirent avec enthousiasme.
En gravant dans leur cœur l’image de Shin’ichi jouant du piano pour eux, ils renouvelèrent leur détermination à suivre avec fierté la noble voie du maître et du disciple au sein du mouvement Soka.
Aucun pouvoir ni aucune autorité ne peuvent détruire les liens spirituels qui unissent le maître et le disciple.
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Le vœu le plus cher de Shin’ichi était que tous les membres continuent de pratiquer avec une foi forte et deviennent heureux.
Avec l’intention de briser les liens de maître et disciple au sein de la Soka Gakkai, un responsable malhonnête, au service de ses propres intérêts, et des moines de la Nichiren Shoshu avaient comploté ensemble en coulisses pour empêcher Shin’ichi de donner des encouragements dans de grandes réunions ou d’apparaître dans le journal Seikyo. Il s’ensuivit une atmosphère oppressante, et un voile sombre s’abattit sur l’organisation.
Quand on lui interdit d’assister à de grandes réunions, Shin’ichi consacra toute son énergie à rendre visite aux membres chez eux et à leur donner des encouragements personnels. Quand on lui dit de ne pas faire de discours, il encouragea les membres en leur offrant des poèmes ou en jouant du piano pour eux.
Rien ne peut détruire un engagement inébranlable pour kosen rufu.
Shin’ichi fit cette proposition aux membres réunis dans le centre de séminaires de Nagano : « Si vous êtes d’accord, pourquoi ne nous retrouverions-nous pas toutes et tous de nouveau le dimanche 26 août pour poser ensemble pour des photos de groupe ? Si d’autres personnes souhaitent venir, elles seront aussi les bienvenues. »
Les membres poussèrent des acclamations joyeuses. C’était ce qu’ils espéraient depuis longtemps. La nouvelle se répandit rapidement dans toute la préfecture.
Les responsables de la préfecture n’avaient pas la moindre idée du nombre de personnes qui viendraient. Le département de la jeunesse se lança dans des préparatifs minutieux pour recevoir tout le monde de façon à ce qu’il n’y ait ni confusion ni désordre, même s’il devait y avoir plusieurs milliers de participants. Ils décidèrent aussi d’installer trois gradins pour que les séances de photographies puissent se dérouler sans heurt.
Ils mirent également au point des heures d’arrivée pour chaque zone. Dans certains endroits, on avait même réservé des cars pour amener les membres jusqu’au centre.
Mais on s’attendait aussi à ce que beaucoup viennent en voiture. Craignant qu’il n’y ait pas assez de place dans le parking, les responsables négocièrent avec le propriétaire d’un terrain vague situé sur la route du centre le droit d’utiliser son terrain comme parking d’appoint. La permission leur fut accordée, mais il fallait arracher les broussailles et mauvaises herbes pour que le terrain soit utilisable.
Des membres du département des jeunes hommes s’attelèrent aussitôt à cette tâche avec une grande énergie. Ils étaient ravis d’œuvrer avec leur maître au succès de cette activité destinée à encourager leurs compagnons de pratique.
Ceux qui ont l’esprit de toujours lutter au côté de leur maître et agissent en ce sens débordent de joie.
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Shin’ichi passa la journée du 24 août, qui marquait le 32e anniversaire de son adhésion à la Soka Gakkai, dans le centre de séminaires de Nagano. Il fit un Gongyo plein d’entrain, en faisant le vœu de prendre un nouveau départ avec une détermination renouvelée.
Peu après midi, il partit en bicyclette avec des membres du département de la jeunesse. Il voulait se remémorer des souvenirs de son maître en visitant les endroits où Toda avait passé son dernier été.
Lorsque Shin’ichi regagna le centre, des jeunes représentants du groupe des éducateurs de la Soka Gakkai venaient d’arriver par car pour participer à un séminaire.
Alors qu’ils étaient encore dans le car, on les avait informés que Shin’ichi était sur place, ce qui les emplit de joie. Ils se placèrent tous devant l’entrée du centre pour le saluer, avec un visage rayonnant.
« Merci ! dit Shin’ichi. Quelle joie de vous voir toutes et tous ici ! Prenons donc ensemble une photo de groupe. »
Shin’ichi se joignit aux éducateurs pour la photo. « Comme vous pouvez le voir, je vais tout à fait bien ! leur dit-il. J’espère que vous irez de l’avant, pleins d’énergie, sur la voie de votre mission, en remportant des victoires, les unes après les autres, tout en étant fiers d’être des membres de la Soka Gakkai. Quoi qu’il arrive, n’abandonnez jamais votre foi. J’espère que vous graverez profondément ce point dans votre cœur. Rien n’est plus douloureux ni plus déchirant pour moi que de voir des personnes s’écarter de la voie de kosen rufu. »
Ce soir-là, Shin’ichi alla de nouveau chez des membres de la région et dialogua avec toutes les personnes sur place.
Le lendemain matin, 25 août, il joua au tennis avec des membres du groupe des éducateurs sur un terrain situé à l’intérieur du centre de séminaires et continua de les encourager.
Le court de tennis avait été mis en place par des membres locaux pour permettre à toutes les personnes qui venaient faire des activités au centre de créer des souvenirs mémorables.
Ensuite, Shin’ichi fit Gongyo avec les membres présents, puis il les applaudit chaleureusement lorsqu’ils quittèrent le centre pour regagner leur foyer.
Shin’ichi priait de tout son cœur et faisait jaillir toute sa sagesse et son ingéniosité afin de trouver le meilleur moyen d’apporter courage et espoir aux membres, tout en respectant les contraintes imposées à ses activités. Nichiren écrit : « […] si l’esprit de la foi est parfait, alors l’eau de la sagesse, de la grande sagesse impartiale, ne s’asséchera jamais. » (Écrits, 1026)
Si nous conservons un engagement fort et prions pour la réalisation de kosen rufu, nous pourrons briser tous les obstacles et ouvrir la voie de la victoire.
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Le 25 août, en fin de matinée, la pluie se mit à tomber et s’intensifia peu à peu à mesure que le jour avançait.
Shin’ichi quitta le centre de séminaires de Nagano pour se rendre chez une famille de membres pionniers, qui avaient beaucoup contribué au développement de kosen rufu à Saku.
Des membres du département des jeunes hommes s’activaient à l’extérieur, sous la pluie. Ils nettoyaient le terrain vague qui devait servir de parking d’appoint pour les participants aux séances de photos de groupe prévues le lendemain.
Shin’ichi dit au responsable qui l’accompagnait : « Donnez-leur l’autorisation d’utiliser la salle de bain du centre de séminaires quand ils auront fini afin qu’ils ne prennent pas froid. Ils seront couverts de boue et de sueur et ils auront besoin de se laver et de se réchauffer. »
Ces jeunes étaient les précieux trésors de la Soka Gakkai. Shin’ichi éprouvait un certain malaise à les voir travailler si dur, maculés de boue, mais il était avant tout déterminé à ce qu’ils ne tombent pas malades.
Une cinquantaine de minutes plus tard, Shin’ichi se rendit au domicile de Katsuo Ishizuka, à Saku. Ishizuka était un quadragénaire, responsable du centre local.
Il parut profondément ému en serrant la main de Shin’ichi. « Sensei ! dit-il. Merci de me rendre visite. »
Le père d’Ishizuka portait un costume et sa mère était vêtue d’un kimono. Tous deux saluèrent Shin’ichi et ceux qui l’accompagnaient avec la plus grande courtoisie.
Durant son séjour, Shin’ichi avait déjà eu l’occasion d’avoir un échange dans le centre de séminaires avec Ishizuka, quand ce dernier était venu apporter son aide. En apprenant qu’Ishizuka avait créé un centre local privé pour les réunions de la Soka Gakkai, Shin’ichi avait voulu aller le remercier, ainsi que sa famille.
Les lieux de réunion mis à disposition par les membres jouent un rôle précieux dans la progression de kosen rufu. Même si de grands centres avaient été construits dans toutes les régions, les domiciles des membres et des bâtiments privés continuaient d’accueillir des réunions de discussion et d’autres activités, pour les districts et les chapitres. Tous ces lieux sont les sièges des magnifiques assemblées du Bouddha de notre époque.
La famille Ishizuka reçut Shin’ichi et son groupe dans le salon. Lors de la conversation, Shin’ichi apprit que le père d’Ishizuka venait d’atteindre son 80e anniversaire.
« À titre de cadeau, j’aimerais vous offrir un poème », dit Shin’ichi.
Voyant alors une éphéméride accrochée au mur, il ajouta : « Me permettez-vous d’écrire dessus ? »
L’éphéméride fut décrochée et, en priant pour la santé et la longévité du couple âgé, Shin’ichi écrivit, à la date du jour :
Quel bonheur que de voir
votre noble apparence
alors que vous avez atteint l’âge vénérable de 80 ans !
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Shin’ichi dit à Katsuo Ishizuka : « Prenez bien soin de votre mère et de votre père jusqu’à la fin de leur vie. La voie de l’humanité consiste d’abord à manifester notre gratitude envers nos parents. Ceux qui gardent toujours cet esprit de reconnaissance mettent véritablement en pratique le bouddhisme de Nichiren. »
Après avoir remercié Ishizuka d’offrir un centre privé pour les activités de la Soka Gakkai, Shin’ichi aborda plusieurs points qu’il convenait de garder chaque jour à l’esprit.
« Il est important de rester en contact étroit avec les responsables qui organisent les réunions afin de veiller à tous les détails, comme la mise en place d’espaces réservés au stationnement des voitures et des bicyclettes et le respect des consignes concernant le bruit, pour ne pas créer de problèmes avec le voisinage. Cela vous demandera sans doute de grands efforts, mais il est essentiel de rendre visite régulièrement à vos voisins pour dialoguer et leur demander de vous faire part d’éventuels problèmes. Il est important de communiquer ouvertement avec eux.
« Obtenir la coopération et le soutien volontaires de vos voisins correspond en soi à kosen rufu. Les centres privés que des membres mettent à disposition pour des activités de la Soka Gakkai sont les citadelles des personnes ordinaires, dédiées à kosen rufu. Y bâtir de solides fondations contribue à consolider la Soka Gakkai. »
Shin’ichi se rendit ensuite au centre privé des Ishizuka, dans le bâtiment voisin. Au rez-de-chaussée se trouvaient les bureaux de l’entreprise d’électricité d’Ishizuka, alors que le premier étage, d’environ 50 mètres carrés, était réservé aux activités de la Soka Gakkai.
Les responsables de chapitre locaux du centre de Saku y étaient réunis. Shin’ichi dirigea la cérémonie de Gongyo avant de se lancer dans une conversation informelle avec les personnes présentes.
Il écrivit aussi ces poèmes qu’il offrit aux membres de Saku :
Je n’oublierai jamais
les regards joyeux
des membres de Saku.
***
Chaque jour quand je prie,
je me demande comment se portent aujourd’hui
mes amis de Saku.
Après sa visite à la famille Ishizuka, Shin’ichi se rendit chez Tatsuomi Kurabayashi. Les liens de la famille Kurabayashi avec cette région remontaient au temps où leurs ancêtres étaient des intendants locaux, au début de l’époque d’Edo (1603-1868). La maison principale, vieille de trois cent cinquante ans, était connue localement sous le nom d’Uguisu Yakata (la villa Rossignol).
Tatsuomi Kurabayashi attendait Shin’ichi et Mineko devant chez lui en tenant un parapluie japonais traditionnel.
« Je suis venu, comme promis », dit Shin’ichi en souriant.
Lors de la réunion générale des responsables à Tokyo, six ans plus tôt, Kurabayashi lui avait parlé de cette maison qu’il avait héritée de sa famille et l’avait invité à venir lui rendre visite.
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Tatsuomi Kurabayashi avait 71 ans, et ses cinq enfants étaient tous engagés dans la Soka Gakkai. Quatre d’entre eux étaient présents ce jour-là, le cinquième habitant aux États-Unis. Accompagnés de leurs conjoints et de leurs enfants, ils se joignirent à Tatsuomi pour accueillir avec chaleur et enthousiasme Shin’ichi et Mineko Yamamoto.
Kurabayashi invita Shin’ichi à s’asseoir à la place d’honneur devant l’alcôve ornementale, dans le salon, en lui disant : « Si vous voulez bien vous asseoir ici. »
Mais Shin’ichi refusa : « Non, je n’en ferai rien. C’est vous, M. Kurabayashi qui devez prendre cette place en votre qualité d’aîné. »
Kurabayashi eut un moment d’hésitation mais, devant l’insistance courtoise de Shin’ichi, il s’assit à la place d’honneur, juste devant l’alcôve.
La pièce était décorée d’un paravent joliment calligraphié, et les piliers en bois noir lustré et les panneaux sculptés et ajourés au-dessus de la porte étaient d’une facture élégante.
Shin’ichi posa des questions sur l’histoire de la maison, auxquelles Kurabayashi répondit en lui racontant la légende associée à sa famille.
Selon cette légende, par un soir d’hiver, l’intendant du village, Hikozaemon, secourut un renard tombé dans un étang gelé et le sauva d’une mort certaine. Il réchauffa et sécha le renard, puis le remit en liberté. Le renard glapit de bonheur et disparut. Le lendemain matin, deux faisans avaient été déposés devant la véranda de la maison. En remarquant les traces de pas dans la neige, l’intendant comprit que ces proies étaient un présent du renard pour le remercier de l’avoir sauvé.
« C’est un exemple qui peut servir de leçon aux êtres humains », dit Shin’ichi, et toutes les personnes présentes acquiescèrent. Elles étaient parfaitement conscientes de l’importance de s’acquitter de leurs dettes de reconnaissance, depuis le jour où un groupe de personnes ingrates avaient comploté contre la Soka Gakkai et fait souffrir des membres sincères et dévoués.
De la même façon, à l’époque où les affaires de Josei Toda traversaient une crise grave, de nombreuses personnes qui avaient largement bénéficié de son aide et de son soutien s’étaient retournées contre lui du jour au lendemain. Elles l’abandonnèrent, en allant même jusqu’à l’injurier et à lui faire part de leur rancœur et de leur hostilité.
Le grand philosophe Socrate a déclaré que l’ingratitude est indéniablement la plus grande des injustices1.
Pour souligner l’importance de la reconnaissance, Nichiren cite une légende des temps anciens qui raconte comment un vieux renard et une tortue blanche se sont acquittés de leur dette de reconnaissance, et il conclut en disant : « […] si les animaux eux-mêmes en savent assez pour se comporter de cette façon, cela devrait être encore plus vrai pour les êtres humains ! » (Écrits, 696)
L’esprit de reconnaissance est le socle même d’une vie digne d’un être humain.
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Dix petits-enfants de Tatsuomi et de son épouse, Yoshino, jouèrent du koto (harpe japonaise), de l’harmonica, du fifre et chantèrent pour Shin’ichi et les personnes qui l’accompagnaient.
Quelle joie de voir ces jeunes trésors de l’avenir, qui avaient hérité de la foi de leurs parents et grands-parents, connaître un si magnifique essor ! Le mouvement de kosen rufu se développe et s’étend au fur et à mesure que le bouddhisme de Nichiren se répand dans nos environnements respectifs, dans la société en général, et se transmet de génération en génération, vers l’avenir lointain.
La pluie avait faibli, et Shin’ichi fit un tour dans le jardin, bras dessus, bras dessous avec Tatsuomi Kurabayashi, qui, humblement, lui fit de nouveau part de toute sa gratitude et lui annonça que ce jour demeurerait sans aucun doute comme le plus mémorable de sa vie.
« Votre vie est une grande victoire, dit Shin’ichi. Vos enfants et petits-enfants sont tous devenus des personnes remarquables. Mais il n’y a pas de fin en ce qui concerne la foi et la pratique bouddhiques. Tant que vous vivrez, continuez de lutter pour vos compagnons de croyance, pour votre environnement et pour kosen rufu. Le plus important commence maintenant, dans cette étape suprême de votre vie. Continuez d’aller de l’avant, pleins d’entrain – vers demain, vers l’avenir. »
Kurabayashi se tourna vers Shin’ichi avec des yeux qui brillaient intensément, et il acquiesça.
Plus tard, pour exprimer sa profonde gratitude, Shin’ichi offrit ce poème à la famille Kurabayashi :
Je garde de merveilleux souvenirs
de votre maison de Saku,
beau château argenté.
Une séance de photos-souvenirs fut organisée dans le centre de séminaires de Nagano, le 26 août. En apprenant que cette séance était ouverte à tous, les membres affluèrent des quatre coins de la préfecture.
La pluie de la veille avait cessé, et une brise rafraîchissante faisait frémir les arbres. Les membres arrivèrent au centre en un flot continu avant midi. Cela faisait presque quatre mois qu’il n’était plus question de Shin’ichi et de ses activités dans le journal Seikyo. Tous voulaient donc le rencontrer ou simplement l’apercevoir, et renouveler leur serment pour kosen rufu.
La force de la Soka Gakkai réside dans l’unité qui découle des liens de maître et disciple forgés par Shin’ichi avec chaque membre, et des liens tissés par les membres entre eux.
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Trois gradins avaient été installées pour les photos de groupes.
Juste avant 13 heures, Shin’ichi Yamamoto dit à Mineko : « Voilà une nouvelle lutte qui commence ! » Vêtu d’un simple polo, il s’avança dans la cour du centre de séminaires pour saluer les membres qui l’attendaient.
« J’avais hâte de vous retrouver ! Merci d’être venus. Prenons un nouveau départ pour le XXIe siècle ! »
Les membres l’acclamèrent. Une femme âgée, le front creusé par des rides profondes, dit, les larmes aux yeux : « Sensei ! J’étais si inquiète et si triste de ne plus vous voir dans le journal Seikyo. Durant tout ce temps, j’ai prié de tout mon cœur. Je suis vraiment soulagée que vous soyez en si bonne forme ! Je suis très heureuse ! »
Shin’ichi l’encouragea chaleureusement : « Merci ! Comme vous le voyez, je vais bien. Si vous allez bien, moi aussi. Je vous garde à jamais dans mon cœur, et, chaque jour, je réciterai Daimoku pour vous. Ainsi, nous serons toujours ensemble, dans cette existence aussi bien que dans la prochaine.
« Menez une longue, très longue vie. Soyez toujours plus rayonnante, plus dynamique et plus heureuse. C’est en soi la force motrice de kosen rufu. C’est la source de l’espoir et de l’inspiration pour vos compagnons de croyance. »
Shin’ichi s’adressa ensuite avec une voix vigoureuse à une autre femme d’un peu plus de 80 ans : « Vivez jusqu’à 100 ans ! Vivez longtemps pour voir le XXIe siècle et l’avenir de kosen rufu ! La Soka Gakkai s’étendra et se développera toujours plus. Elle se répandra largement dans le monde entier. J’engage à présent la lutte pour qu’il en soit ainsi. »
Shin’ichi annonça aussi d’un ton résolu à un membre du département des hommes : « La véritable grandeur de la Soka Gakkai sera à coup sûr reconnue. En ce moment, les moines de la Nichiren Shoshu nous attaquent encore de manière perfide, et certains magazines à sensation poursuivent leur harcèlement insensé, mais, si vous vous laissez déstabiliser par ce genre d’événements, vous ne manquerez pas de le regretter. Seule la Soka Gakkai a déployé des efforts pour réaliser kosen rufu, comme l’enseigne Nichiren. Ne perdez jamais de vue cette vérité incontestable. Continuons de lutter ensemble ! »
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Les personnes qui attendaient de prendre place sur l’un des trois gradins pour la séance de photos formaient une queue interminable. Les membres étaient arrivés par vagues régulières de villes et villages de toute la préfecture, notamment d’Iiyama, Nagano, Ueda, Hotaka, Matsumoto, Shiojiri, Suwa, Iida et Ina.
À chaque fois qu’une photo de groupe était prise, Shin’ichi parlait aux participants, les encourageait et serrait des dizaines, parfois, des centaines de mains.
Alors que la séance tirait à sa fin, un jeune homme énergique au teint hâlé lui adressa la parole d’une voix passionnée : « Sensei ! Merci ! Nous, membres du département des jeunes hommes, sommes déterminés à être à la hauteur de vos espoirs ! Nous lutterons et remporterons la victoire ! »
Shin’ichi lui adressa un sourire chaleureux et répondit : « Très bien. Quand le maître ne peut pas agir en première ligne, il appartient aux disciples de se dresser au nom du maître. Vous n’êtes pas mes véritables disciples si vous êtes incapables de manifester votre énergie ou votre courage sous prétexte que je ne suis pas là en personne. Créez un courant sans précédent pour kosen rufu grâce à vos efforts intrépides, et dépassez votre maître !
« C’est précisément pour un moment comme celui-ci que je vous ai entraînés et encouragés, en faisant tout mon possible pour vous soutenir.
« Le temps est arrivé pour vous de déclarer avec fierté, “Nous nous occupons de tout ! Observez notre lutte !”, et d’aller encourager des membres et d’éclairer leur cœur en mon nom. Tel est le véritable esprit de maître et disciple. Chacun de vous est Shin’ichi Yamamoto ! Je ne vous ai pas entraînés pour que vous soyez des jeunes faibles ou timorés, incapables de manifester leur force authentique au moment crucial. Le temps est venu pour vous de prendre la responsabilité de la Soka Gakkai, là où vous vous trouvez. Rien ne serait plus décevant si, à une époque aussi déterminante, vous cédiez à la tristesse et n’exerciez pas pleinement toutes vos capacités.
« Voilà ce que je ressens, c’est un cri du cœur. Je compte sur vous ! »
Dans les yeux des jeunes brillait une détermination passionnée. Certains serraient les mâchoires et d’autres leurs poings, pour montrer leur ferme résolution.
Lorsqu’il s’était adressé à une assemblée de 10 000 jeunes membres, en octobre 1954, Josei Toda avait déclaré : « Je souhaite que vous vous dressiez avec courage pour relever les nombreux défis qui vous attendent2. »
Shin’ichi ressentait exactement la même chose.